« Souvent, le théâtre c’est la nuit. Souvent, c’est profondément beau. Il est difficile d’expliquer la beauté profonde de quelque chose, nous avons peut-être trop pris l’habitude des surfaces, plus faciles à arpenter. Il y a une profondeur qui est tapie dans la nuit du théâtre de Tanguy et du Théâtre du Radeau, c’est une profondeur enthousiaste et légère.
La profondeur de la beauté nécessaire, face à l’éternelle grimace de l’histoire. »
« C’est un théâtre qui parle du théâtre, avec les moyens du théâtre : ce n’est pas un théâtre de concepts ou de notions, Tanguy et le Radeau ne sont pas philosophes, même si au bout, il y a sans doute une question posée et une réponse proposée à la vérité de quelque chose, une vérité du théâtre et non de théâtre. De même, ce n’est pas un théâtre politique, bien qu’il y ait un engagement de ce théâtre face à ce qui lui est public, bien qu’il y ait un engagement de ce théâtre face à ce qui lui est public, à ce qu’il partage en commun avec d’autres. Ces données, philosophie et politique investissent par en dessous ce théâtre dans des agencements qui emportent ses matières vers des devenirs imprévus. C’est un théâtre où les planches jouent un rôle déterminant, les coulisses, les lumières, les sons, décomposés en paroles, en musique, recomposés par instant en quelque chose qui doit être de l’ordre du sens et de la sensation. C’est un théâtre de bois et d’acteurs qui aboutissent à ce que Tanguy appelle la contemporanéité : cela signifie sans doute dire son mot dans le débat autour de la représentation, la faire – sans en être le représentant – non pas à l’écart, mais au cœur même des affaires du théâtre. C’est déjà plein de théâtre, avec des fables parfois douloureuses et mélancoliques, parfois drôles et grotesques ; parfois l’un et l’autre mélangés en un motif qui n’est pas seul et qui n’est pas le même. »
Extrait de François Tanguy et le Radeau – Jean-Paul Manganaro – chez P.O.L